L'Uniic s'énerve contre le projet de suppression de la propagande électorale

Comme un marronnier, l'avenir de l'information électorale envoyée à chaque citoyen est remis en cause.

Énervée et lasse... après le projet de loi des finances 2014, puis 2015, l'Union nationale des industries de l'impression et de la communication (Uniic) dénonce une nouvelle fois les arguments du gouvernement qui a inscrit la suppression de la propagande électorale papier dans le projet de loi des finances 2017. Et une nouvelle fois, l'Uniic tient à souligner la désinformation martelée pour justifier ce syndrome "maniaco-numérique".

Une économie pour qui ?

L'organisation patronale présidée par Pascal Bovéro ne souhaite pas employer le mot "dématérialisation". "Au contraire", explique-t-elle, "si le projet voit le jour, savoir pour qui voter nécessitera d'être équipé de beaucoup de matériel dont ma mère, qui vient d'avoir 94 ans et n'a jamais raté une élection, songe à s'équiper : internet, ordinateur, écran connecté…" Et "les économies s'il y en a, dont le détail n'est évidemment pas communiqué, seront donc en grande partie à la charge des ménages."

Les disparités renforcées

L'argument économique pose ainsi la question fondamentale du coût de la démocratie. "Nous passerions d'une distribution ultra-égalitaire en boîtes aux lettres, à une mise à disposition arbitraire, dépendante (entre autres) des conditions d'accès à internet et du niveau d'équipement de tout un chacun."
Ces inégalités d'accès épouseraient sensiblement les contours des disparités sociales de la population, tout autant qu'elles marqueraient une nette rupture générationnelle. "Faut-il accepter cette forme implicite d'exclusion de la vie démocratique, au nom d'une économie budgétaire ?"

Le papier vraiment moins écologique que le digital ?

L'Uniic est aussi fatiguée de devoir contrer le perpétuel argument écologique. Si le rapport commandé par Bercy et le ministère de l'Intérieur attribue la destruction de 105 hectares de forêt pour la production des professions de foi et bulletins de vote envoyée en 2012, l'union professionnelle rappelle qu'au titre de prescriptions relatives au code électoral, aucun support ne peut être pris en charge par l'État s'il ne répond pas aux exigences écologiques liées à un papier responsable, c'est-à-dire un papier contenant au moins 50 % de fibres recyclées ou un papier bénéficiant d'une certification délivrée par les systèmes FSC ou PEFC.
"Propager de tels raccourcis confine donc à la désinformation écologique et ajoute au mépris d'une filière qui s'est de longue date attachée à être responsable."
Elle poursuit : "Et qu'en est-il de tous les serveurs nécessaires au traitement des milliers de pages qui vont transiter par les tuyaux du big data ? De la destinée de tous les composants et autres métaux lourds des appareils en fin de vie ?" Personne ne le sait vraiment. Mais une chose est sûre : tout ce qui est virtuel n'est pas forcément vertueux.

L'efficacité du papier ne peut être remis en cause

L'union professionnelle s'insurge également que le rapport évoque "l'inefficacité" du dispositif en boîtes aux lettres en arguant des retards d'envoi, des erreurs de documents et près de 7 % des courriers retournés en mairie. Une telle observation sur "l'efficacité" est à remettre en perspective : quelle sera la proportion d'électeurs qui fournira l'effort d'aller sur les pages internet hébergeant les professions de foi ? Elle rappelle que bon nombre d'études ont prouvé que le support papier a plus impacte sur les destinataires que les supports numériques.
"S'il s'agit d'imposer un mode d'information "efficace", dématérialiser les contenus n'aurait probablement pas plus de sens que de substituer aux imprimés publicitaires des courriels volatiles dont le moindre impact a été démontré maintes fois."

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