Edito / Presse imprimée : les éditeurs alertent sur l'impact de la hausse des tarifs de La Poste

Une hausse de 7 % des tarifs postaux prévue au 1er janvier 2026 inquiète la filière presse. Trois syndicats dénoncent un revirement de La Poste, accusée de fragiliser la distribution papier.

L'annonce d'une nouvelle hausse tarifaire sur le transport de la presse par La Poste continue de faire réagir. Prévue pour le 1er janvier 2026, cette augmentation de 7 % s'inscrit dans un contexte déjà tendu pour les titres imprimés. En réaction, les représentants de plus de 2 500 publications interpellent l'État et pointent une remise en cause de la mission de service public.

Les éditeurs dénoncent un revirement de La Poste, qui avait pourtant signé un accord en 2022 garantissant une visibilité tarifaire jusqu'en 2027. Selon l'Alliance de la presse d'information générale (APIG), le SEPM et la FNPS, l'entreprise publique aurait invoqué une clause de revoyure pour justifier cette hausse anticipée. La Poste avance notamment une augmentation de 40 % de ses coûts de distribution de la presse en 2023.

Ce choix soulève une incompréhension dans la profession. Pour les syndicats, il s'agit surtout d'une tentative de compenser la baisse structurelle du courrier traditionnel, en transférant la charge financière sur les éditeurs.

Dans le projet de loi de finances pour 2026, les crédits alloués au soutien à la distribution (postage + portage) chuteraient de 10 millions d'euros à 139 millions d'€. L'aide spécifique au postage d'environ 75 millions d'€ en 2025 passerait à 70 millions d'€ en 2026.

La hausse de 7 % annoncée par La Poste à compter du 1er janvier 2026 affectera directement le prix unitaire de distribution de la presse par voie postale. Pour les titres relevant de la presse d'information politique et générale (PIPG), le tarif passerait en moyenne de 0,35 à 0,38 € par exemplaire. Les publications spécialisées, quant à elles, verraient leur coût grimper de 0,50 à environ 0,53 €. Pour les titres hors du périmètre des aides postales, le tarif avoisinerait désormais 1 euro, contre 0,90 € actuellement.

En toile de fond, La Poste évoque une augmentation de 40 % de ses coûts de distribution en 2023. Le recul structurel des volumes de courrier pèse désormais lourd sur les comptes du groupe, qui cherche à transférer une partie de ces charges sur d'autres segments, notamment la presse.

Mais du point de vue des éditeurs, cette logique revient à faire supporter à un secteur fragile les conséquences d'un déclin postal qui n'est pas de son fait. L'entreprise publique a dégagé un bénéfice de 1,4 milliard d'euros en 2023, ce qui alimente l'incompréhension. Les professionnels de la presse estiment que ce n'est ni à eux, ni aux abonnés, de compenser un modèle économique en perte de vitesse.

Dans les faits, plus de deux millions d'exemplaires papier sont encore distribués chaque jour par La Poste, y compris dans les territoires les plus éloignés. Ce service postal de la presse est encadré par la loi, et constitue un des derniers maillons de l'égalité d'accès à l'information. Cette hausse tarifaire menace directement la viabilité économique d'une version papier à l'heure où la dématérialisation progresse.

Malgré la progression des abonnements numériques et des audiences en ligne, les recettes issues du support imprimé représentent encore, selon les éditeurs, jusqu'à 80 % du chiffre d'affaires. Ce revenu permet de financer l'ensemble de la chaîne éditoriale, y compris les investissements dans le numérique.

À l'heure où chaque ligne budgétaire est scrutée et où l'on demande des efforts à tous les français, il serait temps que tous les acteurs, de l'État à La Poste, en passant par les éditeurs, assument pleinement leur part de responsabilité dans un cadre budgétaire global, lisible et durable. Quand on sait que les aides à la presse, directes et indirectes, dépassent les 460 millions d'€ par an et pourraient atteindre 564,5 millions en 2025 à périmètre constant, la question n'est plus seulement celle des montants engagés, mais bien de leur cohérence et de leur efficacité.

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