Réglementation anti-déforestation : Intergraf alerte sur une mise en oeuvre irréaliste

© © Ministère de la Transition écologique, de l'Énergie, du Climat et de la Prévention des risques

Alors qu'il doit entrer en vigueur prochainement, le règlement européen sur la déforestation suscite de vives inquiétudes dans la filière graphique. Intergraf demande à Bruxelles de suspendre le calendrier prévu.

Après Copacel, c'est au tour de l'association européenne Intergraf, qui regroupe les fédérations nationales du secteur de l'impression, de dénoncer le Règlement sur la déforestation de l'Union européenne (RDUE ou EUDR). Ce texte, qui impose des obligations de traçabilité renforcées sur les produits dérivés du bois, est censé entrer en vigueur à compter du 30 décembre 2025 pour les entreprises de plus de 250 salariés et un an plus tard pour les PME.

Une industrie de l'imprimerie, peu préparée à gérer des millions de données

Intergraf rappelle que le secteur européen de l'impression compte environ 100 000 entreprises, dont 95 % emploient moins de 20 salariés. Dans une chaîne de valeur fragmentée, les tâches de déclaration et de transmission de données risquent de se multiplier à mesure que les produits transitent entre fournisseurs, imprimeurs, façonnier et distributeurs. Selon des estimations antérieures de l'industrie papetière reprises par Intergraf, un livre pourrait contenir jusqu'à 300 000 parcelles forestières distinctes, chacune susceptible de devoir être associées à un identifiant DDS.

Le traitement de ces informations, leur intégration aux systèmes existants et leur transmission de manière fiable et documentée représentent, l'on peut aisément le comprendre, une charge insurmontable pour une majorité de structures.

Une fausse différenciation entre grands groupes et PME

Officiellement, les petites et microentreprises bénéficieront d'un délai supplémentaire de douze mois pour se conformer aux obligations de l'EUDR. Mais dans les faits, cette disposition ne sert à rien. Les imprimeries de petite taille sont très souvent sous-traitantes de groupes plus importants qui, eux, devront être en conformité dès fin 2025. Ce décalage de calendrier ne pourra donc pas être mis en œuvre sans perturber les relations commerciales, poussant de facto l'ensemble des acteurs à adopter la nouvelle réglementation en même temps.

Intergraf appelle en conséquence à l'abandon du mécanisme de transmission individuelle des identifiants DDS, au profit d'une traçabilité agrégée. Celle-ci s'appuierait sur un enregistrement classique des fournisseurs et clients, avec nom, adresse et numéro EORI pour les échanges internationaux. Une telle méthode permettrait, selon l'association professionnelle, d'atteindre l'objectif environnemental sans bloquer les circuits économiques.

Intergraf demande une pause réglementaire pour évaluer les impacts

Enfin, Intergraf demande la suspension temporaire du calendrier réglementaire, afin de permettre une évaluation complète des impacts opérationnels du texte. L'organisation souhaite que cette période serve à identifier des mécanismes simplifiés, techniquement viables, sans pour autant remettre en cause les ambitions environnementales initiales de l'Union européenne.

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