90 salariés mobilisés à La Rochette : vers un bras de fer autour du site DS Smith

La cartonnerie DS Smith de La Rochette, en Savoie, doit fermer en 2026. Les salariés dénoncent une décision prise sans recherche de repreneur ni justification industrielle crédible. Face à l'absence de dialogue, les syndicats appellent à la transparence et à l'intervention de l'État.

"Chaque emploi perdu, c'est une famille qui tremble" : le slogan affiché devant l'usine DS Smith La Rochette traduit l'inquiétude des 90 confrontés à la fermeture de leur site. Dans cette vallée de Savoie, salariés, élus et syndicats dénoncent une fin imposée sans concertation, une décision prise hors-sol et sans recherche de solution alternative.

Implantée depuis plus de 150 ans à Valgelon-La Rochette, l'usine qui fabrique des emballages en carton, principalement à destination de l'agroalimentaire, emploie 90 personnes. En janvier 2025, elle est passée, avec les autres sites du groupe britannique DS Smith, sous le giron de l'Américain International Papier.

Sa fermeture annoncée début novembre serait due, selon la direction, "un cumul de pertes depuis plusieurs années" et une "dégradation durable de la conjoncture économique". Des arguments que contestent les représentants du personnel, pour qui la décision est strictement financière.

Une délégation reçue au ministère de l'Industrie

Mercredi 10 décembre, une délégation rassemblant syndicats, élus locaux et parlementaires a été reçue au ministère de l'Industrie par Sébastien Martin.
La CGT était représentée par Carlos Dos Santos, délégué syndical DS Smith, Cédrick Laparlière de Filpac et Kévin Dos Santos de l'UD CGT Savoie. Tous ont dénoncé une décision de fermeture prise sans justification industrielle solide. La CGT Savoie estime que le site est techniquement et économiquement viable. "Ce sont des décisions sur plusieurs années dénuées d'investissements qui fragilisent l'avenir de La Rochette, non les performances du site ni le travail des salariés."

Selon les représentants syndicaux, aucun acteur du secteur n'a été sollicité dans le cadre d'une éventuelle cession, en contradiction totale avec l'esprit de la loi Florange. Aucun contact n'aurait été pris avec Saica, Rossmann, Smurfit Kappa ou encore VPK. "Il s'agit purement et simplement d'un choix financier", affirme la CGT dans un communiqué.

La délégation a demandé la mise en place d'un comité de suivi réunissant collectivités, syndicats, services de l'État et direction. Elle a également réclamé un accord de méthode garantissant un dialogue social réel, ainsi qu'une conférence économique et sociale à l'échelle départementale. Le ministre s'est engagé à saisir la préfète de Savoie pour enclencher ce cadre de travail.

90 cercueils en carton devant l'usine DS Smith

À La Rochette le même jour, les salariés ont débrayé à partir de 10 h. Ils ont construit un mur de cartons portant les noms et anciennetés de chacun. Une action symbolique visant à rendre visible ce que signifie concrètement une fermeture.

Dans un discours lu sur place, Maud Michaux, assistante commerciale de DS Smith Savoie, a rappelé : "Cette décision a été prise à distance, loin du terrain, sans venir regarder la réalité humaine qui se cache derrière. (…) On ne ferme pas un site comme on supprime une case sur un fichier Excel : on détruit un tissu social, une économie locale, et des vies."

La salariée a également souligné que "certains clients commencent à s'inquiéter" mais que les équipes restent mobilisées : "Nous faisons notre travail jusqu'au bout, malgré la pression, malgré l'inquiétude."

"Si nous sommes là aujourd'hui, c'est pour montrer notre soutien à nos élus qui sont montés à Paris. (…) Nous ne demandons pas le miracle. Nous demandons de la considération, du dialogue et des solutions à la hauteur de ce qui est en train d'être détruit ici."

Une direction absente, une stratégie verrouillée

Le même jour, à 11 h, une délégation intersyndicale (CGT et FO) s'est rendue au siège de DS Smith France à Puteaux pour obtenir des éclaircissements. La direction, informée de la visite, n'était pas présente. Seule la responsable des relations sociales a reçu les représentants. Les échanges ont mis en évidence un désengagement complet : la direction locale renvoie vers le siège, qui renvoie à son tour vers le site. Un double jeu dénoncé par les syndicats.

Le cabinet Alixio, chargé d'accompagner la réorganisation, est également mis en cause. Les syndicats estiment que son intervention se limite à valider le scénario de fermeture, sans considération pour d'éventuelles alternatives.

Des premières discussions à venir

Une première réunion de négociation est prévue le mardi 16 décembre. Les représentants du personnel attendent un retour de la direction sur leurs revendications.

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